• Episode 3 : Impatience

    Je rentrais une fois de plus, du travail, commençant à m'habituer à cette petite routine qui s'installait peu à peu...



    Les jours passaient relativement rapidement, et je me plaisais ici. Le cadre agréable de la mer et le calme de la petite ville étaient plaisants, et le travail n'était pas si éprouvant, même si les commandes à domicile étaient plus embêtantes. Mais je m'acquittais de tout cela sans trop de mal.



    David se tenait encore sur le porche, légèrement comateux, comme à son habitude. Il avait un rythme de vie légèrement déconnecté...

    -Salut David, engageai-je.
    -Salut.
    -ALice est à l'intérieur ?
    -Yep.



    Il se redressa lentement, comme pour se sortir d'un état proche du sommeil.

    -Eh ben, c'est dur comme ça ? m'amusai-je.
    -J'me fais chier surtout, pas de motivation. Alice est avec un mec à l'intérieur entrain de discuter de bouquins. Tu le connais ?
    -Ah, euh, j'en sais rien, je l'ai pas encore vu. Sûrement un collègue...



    J'entrai alors dans la maison, découvrant un débat intellectuel autour de livres qui semblait mené avec beaucoup de réflexion...



    -Non tu comprends, argumenta l'homme aux côtés d'Alice, j'ai des doutes sur le point de vue du client dans tout ça. On a des habitués et réorganiser les magazines ça pourrait nous faire perdre en fidélité sur pas mal de monde...



    -Mais non, justement, réfléchis, c'est l'occasion de faire découvrir de nouvelles lectures, en les mettant un peu en valeur parmi celles que les gens ont l'habitude de voir !
    -Je ne sais pas...
    -Ahem, interrompis-je, je dérange peut-être ?



    -Ah, salut Aurore ! fit Alice.
    -Salut, répondis-je. Tu débats d'une nouvelle disposition des magazines ?
    -Ouais, ça ferait peut-être pas de mal au magasin, on a de nouveaux abonnements. Au fait, je te présente Chris, il travaille avec moi à la librairie.
    -Salut ! ajouta simplement ledit Chris.
    -Enchantée, fis-je.



    -Bon, eh ben c'est pas tout, mais je ferais bien de repartir, il est tard. On en rediscute demain, Alice ?
    -Pas de problème, on a encore le temps !



    Je les regardais se faire la bise, non sans un certain amusement...

    -À demain, rentre bien, lui conseilla Alice.
    -T'inquiète, bonne soirée.



    Je me tournai alors vers Alice, qui le regardait partir.

    -Dis-donc, toi, tu me prendrais pas pour une cruche, des fois que ?
    -Je ne vois pas du tout ce que tu veux dire, me répondit-elle avec une extrême mauvaise foi.
    -Ouais, c'est ça...

    Elle attendit un moment qu'il soit hors de la rue, avec un sourire aux lèvres, avant de mettre fin au silence :

    -Il est sexy hein ?!



    Nous éclatâmes alors dans un rire tonitruant digne de dindes excitées, comme nous savions parfois si bien le faire...

    -J'y crois pas ! m'enthousiasmai-je. Et ça fait combien de temps comme ça ??
    -Il me fait de l'oeil depuis un mois, haha !



    -Mais t'en parles à personne, hein ? ajouta Alice.
    -Promis, ris-je.



    Alice se retourna aux pas sur le perron. David s'apprêtait à partir.



    -On peut savoir où tu vas comme ça, David ?



    -Euuh, je vais juste me balader un petit coup sur la plage, je prends un peu l'air, quoi...



    -Ouais, j'y crois pas trop. Tu fais beaucoup de sorties comme ça ces temps-ci, le juge a dit que c'était déconseillé de partir trop loin de la maison, si tu vois ce que je veux dire.



    -Mais putain, tu peux pas arrêter de me casser les couilles deux minutes ?! Tu t'es pris pour maman ou quoi ?! T'as pas envie de me faire des analyses quand je rentre ? Tu me fous la paix ! ça ira mieux pour toi et moi !



    -DAVID ! Tu me parles pas comme ça ! Je te préviens si tu fais des conneries c'est pas moi ou maman qui allons te punir, là, okay ?! C'EST GRAVE, MERDE !!

    Mais David préféra nous tourner le dos et nous ignorer, en partant vers la plage...



    -Hé, du calme, tempérai-je. T'emporte pas, il voulait peut-être pas dire ça...
    -Désolée, se calme Alice, mais... il me fait tourner en bourrique, et je suis inquiète... Tu te rends compte s'il recommençait ?
    -Je sais... mais il disait sûrement la vérité, après tout, non ? Allez viens, on va à l'intérieur.



    Alice s'attela alors à préparer le dîner.

    -Je fais une salade, t'en dis quoi ?
    -Ça me va très bien. Je mets la table ?
    -Occupe-toi surtout d'enlever l'ordi de la table, s'il te plaît, t'embête pas pour le reste.
    -Pourquoi tu l'as mis là, au fait, on ne s'en est même pas servis ?-Je pensais regarder mes mails avant de manger, mais j'ai plus la tête à ça, là...



    Mais le téléphone ne me laissa pas le temps de faire grand chose. Je décrochai avec peu de volonté en voyant le numéro de ma patronne s'afficher.

    -Oui, Émeline ?
    -Aurore ! Je sais que vos heures de travail sont terminées, mais j'ai besoin de vous pour une commande à domicile, tous les autres sont occupés !
    -Vraiment ? Oh, eh bien... d'accord.
    -Vous êtes une ange, ma cocotte ! Venez dès que vous pouvez au restaurant et je vous donne le paquet et l'adresse.
    -Très bien, à tout de suite.

    Je raccrochai, légèrement dépitée de devoir interrompre mon repas avec Alice, qui semblait en avoir besoin.



    -Un problème ? dit-elle en arrivant dans la pièce.
    -Ouais, répondis-je. Ma patronne a personne d'autre que moi pour une livraison.
    -Ah merde... j'imagine que tu as dit oui ?
    -J'étais obligée... je vais pas faire mauvaise impression, je suis nouvelle. Est-ce que ça va aller ?
    -Ouais, vas-y, ça fait rien. Je te mets les restes au frigo.
    -Merci, t'es trop mignonne.

    J'embrassai affectueusement sur la joue Alice, avant de filer au travail.



    Peu de temps après, j'arrivai derrière le grand immeuble d'affaires de la ville. Ce n'était pas la première fois que je devais livrer une commande ici. Généralement, c'était au même nom, et un employé venait la récupérer pour la personne. Ce devait être quelqu'un de haut placé.



    Je patientais à chaque fois un certain temps, seule. Cela devenait légèrement lassant mais qu'importe, c'était mon travail, après tout.



    Je décidai alors de passer par la plage en rentrant, histoire de me changer les idées. J'avais besoin d'un peu du bruit des vagues et du vent frais du soir...



    Mais je fis une rencontre perturbant ma promenade, et le calme de mon esprit.

    -Hey, me fit David
    -Hey, répondis-je machinalement.



    -Tu te promènes toi aussi ? Eh... ecoute, j'suis désolé pour tout à l'heure... j'aurais pas dû lui répondre mal. Pas devant toi.



    -Ecoute, David, c'est pas grave. J'imagine que de vous voir quasiment vingt-quatre heures sur vingt-quatre, ça vous met un peu l'un sur l'autre, et ça joue sur les nerfs. Alice aussi s'est emportée...



    -Ouais... je comprends qu'elle s'inquiète, mais j'sais pas quoi faire de mes journées. Si je m'éloigne de plus de 200 m de la maison, retour à la case départ. Pas mieux que la prison.
    -Bien sûr que si, David, tu as ta soeur. Et tu m'as moi, maintenant. C'est mieux que dans des murs gris avec d'autres criminels, non ?
    -Ouais... t'as raison.
    -Allez, viens, on va rentrer.



    -Je me demande comment tu fais pour pas avoir encore de mec. Nan, sérieux, t'es canon et gentille. Ça court pas les rues des filles comme toi.
    -Haha, tu comptes obtenir quoi avec ça ?
    -Comment je me fais accuser direct, quoi !

    Je fis une gentille tape à David, en riant avec lui, sur le chemin du retour. Il avait bon fond, et je sentais qu'il semblait bien mieux que dans les débuts de son arrivée ici, d'après les descriptions d'Alice. J'avais une confiance étrangement solide dans son rétablissement moral.



    Le lendemain, je me préparai à nouveau pour aller au travail, après avoir reçu une nouvelle commande à domicile.

    -C'est moi, commença Alice, ou cette histoire de livraison commence à se répéter beaucoup ?
    -Non, c'est bel et bien récurrent, répondis-je. La personne en question est visiblement beaucoup occupé par les réunions ces temps-ci.
    -Ouais, beaucoup occupé par la paresse, ironisa Alice.



    -En même temps, tu veux que je fasse quoi ? C'est mon boulot, et on doit répondre à toutes les demandes. Raaah, ce que ça peut me stresser...



    -Fais gaffe, à t'énerver tu vas recommencer à jurer et à parler toute seule. Souviens-toi des évals de la deuxième année...
    -Oui, je sais... Mais bon, je vais faire ce que je peux.

    Je quittai alors ma meilleure amie pour les folles animations du travail.



    Bien sûr, le détour par le centre de bureaux fut inévitable... Mais je patientais encore avec beaucoup de calme. Après tout, je n'avais pas de raison de m'énerver ?



    Et je finis ma journée, dans les heures creuses du restaurant, laissant les services du soir à d'autres personnes...



    Les rues calmes me soulageaient de ma fatigue, accumulée après tant de plats amenés à la table...



    Et l'odeur des fleurs du jardin était un petit plaisir quotidien qui faisait de ma journée le résumé d'une vie agréable.



    Je me réjouis à la vue de mon amie et de son frère, agités dans une compétition commune.

    -Si tu t'y prends comme ça t'es pas prêt d'être premier un jour ! s'enquit Alice.
    -Ah mais attends, tu vas voir si tu l'évites celui là ! menaça David.



    -Alors, en plein effort ? m'amusai-je.
    -Salut ma poupounette ! me répondit Alice. Je suis occupé à mettre une raclée à ce cher frère incapable de reconnaître que je suis plus forte que lui au jeux de course !
    -Mais tu triches ou quoi ? Merde ! se plaint David.



    -Non, ça s'appelle du talent mon petit père ! se moqua Alice.
    -Ouais, attends, les raccourcis y'a pas que toi qui les connaît...
    -Un combat de force s'engage, haha ! Ris-je.



    Mais une fois de plus, le téléphone eut raison de ce moment de jeu.

    -Allô... Quoi ? Euh... non, Émeline, ça ne me dérange pas... Bien sûr... Comptez sur moi. Oui, à tout de suite.



    -Une autre commande ? interrogea Alice.
    -Môssieur le client roi demande une nouvelle livraison expressément ce soir ! Je suis à nouveau la seule disponible, parce qu'évidemment, c'est le rush au restaurant... Raaah !!
    -Be careful ma poupounette ! Tu t'énerves là !
    -Ouais, je sais !



    Agacée, je rejoins alors une fois de plus le centre d'affaires...



    Mais la patience s'évapora et le temps usa mes nerfs. J'étais éreintée de ces commandes capricieuses.

    -Grrrmmbll...



    -Raaah ! Si je pouvais faire tomber de l'immeuble le connard qui me fait chier à 7h du soir ! C'est PAS possible de faire venir constamment les gens comme ça ! La prochaine fois je lui livre de la merde, on va voir si ça lui plaît toujours !!



    -Oui, c'est vrai que c'est agaçant les gens comme ça, on est toujours dérangé. Pourrais-je avoir ma commande maintenant ?
    -...


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